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Article • Bureau exécutif • Actualité • 15 December 2022

RH : Vers une pénurie d’exploitants dans le TRM ?

 

Véritables chefs d’orchestre dans une entreprise de transport, les exploitants manquent à l’appel. Nous avons interrogé des dirigeants pour tenter de comprendre ce phénomène. 

 

« C’est compliqué de trouver du personnel roulant, mais ce n’est pas simple non plus de recruter des exploitants», confirme Bertrand Rouillé qui dirige Rouillé Coulon à Boisseron (34). Le chef d’entreprise veille à garder ceux en poste et table sur la formation pour compléter ses équipes. « Nous prenons des alternants à qui nous apprenons le métier, en espérant les garder après les avoir formés», explique le transporteur qui admet que c’est un métier exigeant, dont les attentes ne correspondent plus à ce que recherche la jeune génération.

« À nous de réinventer la profession pour leur redonner envie de l’exercer», plaide-t-il. Ce qu’il tente de réaliser en proposant des plannings qui leur accordent plus de temps libre, tout en veillant à proposer une juste rémunération.

“Les jeunes recherchent du temps pour avoir une vie sociale plus riche”

Mais Sandrine Bachy, gérante des transports Adrien à Teyran (34) et présidente de l’Unostra, estime que le problème d’attractivité ne se réglera pas seulement par la fiche de paie. « Gagner beaucoup d’argent n’est plus la priorité des millénials. Ils recherchent des postes qui leur laissent le temps d’avoir une vie sociale plus riche», assure-t-elle. Or, le métier d’exploitant est exigeant.

« Ils doivent avoir un bon relationnel, être à l’écoute des clients et des conducteurs, savoir faire preuve de diplomatie et d’initiative, être à l’aise avec les chiffres, l’informatique et l’anglais et résister à la pression. C’est un métier passionnant, avec d’énormes responsabilités, très stressant, qui impose de ne pas être regardant sur les horaires», détaille Sandrine Bachy. « Même si nous avons du mal à comprendre les attentes des jeunes, nous devons les prendre en compte si nous voulons les attirer vers nos emplois. Ce qui va demander écoute et imagination. »

Exploitants : Une situation géographique pénalisante

Laurent Trillat, qui dirige Optiroad, 64 salariés dont 55 conducteurs, à Ablis (78), serait prêt à mettre le prix pour trouver l’exploitant qu’il recherche depuis 6 mois et le responsable d’exploitation qu’il espère depuis 3 ans ! « Nous avons réalisé 9,1millions de CA l’an dernier et devrions terminer l’année à 12. Mais nous pourrions aller au-delà si nous trouvions des candidats pour nous staffer», regrette le chef d’entreprise qui explique sa difficulté à recruter par son implantation.

« Entre Paris et la région de Chartres, nous sommes dans un no man’s land qui n’intéresse personne. D’autant qu’avec la hausse du carburant, les candidats rechignent à regarder les offres d’emploi qui les contraindraient à parcourir des kilomètres», déplore le transporteur. Pour pallier ce manque de personnel, le dirigeant est contraint de s’imposer une amplitude de travail de 4h à 20h.

Il a aussi conscience d’en demander beaucoup à ses équipes. « Il faut que je trouve une solution, car je ne peux pas imposer à mes collaborateurs une surcharge de travail pendant trop longtemps si je veux les garder. C’est pourquoi j’ai décidé de confier le recrutement à deux cabinets spécialisés. Cela nous coûtera entre 7000 et 10000euros, s’ils arrivent à trouver. »

Des exploitants débauchés pour devenir affréteurs 

Frédéric Hartstein est président de Lid Consulting, spécialisé dans la recherche d’encadrants pour le secteur du transport. S’il confirme avoir beaucoup de demandes pour des postes d’exploitants, ce sont surtout des affréteurs qui lui manquent. « Nous en recherchons actuellement une centaine. Tout le monde se les arrache, parce que l’affrètement permet de réaliser de belles marges. Et comme il n’existe pas de formation à ce métier, nous débauchons des exploitants en poste en leur proposant de belles rémunérations. »

VC

3 questions à Oliver Weitig, président de l'AETL

Transport Info: Il est difficile de trouver des exploitants actuellement. Comment expliquez-vous ce phénomène?
Olivier Weitig: On en cherche par centaines. Mais si les jeunes ne répondent pas aux annonces, c’est parfois simplement pour une raison pratique. Les entreprises qui recrutent sont souvent situées dans des zones où il faut avoir son permis et une voiture.

Or, beaucoup de jeunes diplômés ne sont pas véhiculés. À cela s’ajoute le fait que les transporteurs ne soient plus les seuls à recruter des exploitants. Les industriels qui se sont lancés dans l’e-commerce en embauchent également, à des salaires avec lesquels les transporteurs ont du mal à rivaliser. Difficile de lutter avec des entreprises comme Total Energy, Vuitton ou L’Oréal qui, en plus d’offrir de généreuses rémunérations, proposent de l’intéressement. 

« L’image du métier d’exploitant ne correspond plus à la réalité. »

TI: Est-ce qu’on en forme suffisamment?
OWIl suffit d’un bac pro ou d’un BTS pour exercer comme exploitant. Mais comme en France on aime les diplômes, les jeunes sont poussés par leurs parents et poursuivent jusqu’au Bac +5, espérant que cela leur permettra de démarrer plus haut leur carrière.

Ce qui est un leurre, car dans le transport, on a davantage besoin d’opérationnels que de managers. Après de longues études, ces jeunes sont parfois contraints d’accepter un poste d’exploitant. Ce qui n’a rien de dévalorisant. Au contraire. On pilote les activités de l’entreprise, on gère 15 à 20 chauffeurs, il y a peu de postes où on vous confie autant de responsabilités à vingt ans. 

TICe métier n’en demande-t-il pas trop aux jeunes générations qui ont d’autres attentes vis-à-vis du travail?
OW: L’image négative qu’on pouvait avoir de cette profession n’a plus lieu d’être. Fini le temps où on savait quand on commençait, mais pas quand on terminait. Et puis la tension a fait augmenter les salaires de 10 % en un an.

En province, les entreprises doivent offrir entre 28 000 et 30 000 euros pour espérer trouver un exploitant, tandis qu’en région parisienne, le salaire d’un débutant démarre à 34 000 euros annuels. Pas mal pour un Bac +2 ou 3, d’autant que des bonus peuvent s’y ajouter. 

 

 

Source : www.transportinfo.fr/

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