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Article • Paris Nord • Actualité • 07 June 2016

Rencontre Monique RABIN - Députée de Loire Atlantique

Diplômée en droit public, sa carrière débute en 1975 dans la fonction publique territoriale où elle acquiert des compétences très diverses : marchés publics, gestion financière, relations internationales...
Elle devient ensuite collaboratrice d’Edmond Hervé, Maire de Rennes, avant de le suivre à l'Assemblée nationale afin de devenir sa collaboratrice parlementaire pendant 12 ans.

Elue locale à Saint Philbert de Grand Lieu (44) depuis mars 2001, elle fut maire de cette commune de 2008 à 2014.

Aujourd'hui Députée, elle est membre de la Commission des finances, rapporteure spéciale pour le budget du commerce extérieur, membre du Comité d'évaluation et de contrôle, et chargée de représenter le Parlement à l'Observatoire économique des Achats de l'Etat.

 

Madame Rabin, en tant que première femme à être élue députée de votre circonscription vous êtes fortement engagée dans la lutte contre les discriminations de tout ordre. Dans le cadre de cette engagement, vous avez organisé le 23 mai une soirée débat intitulée « Parcours de femmes » qui faisait notamment suite à des rencontres avec des jeunes de 4e et 3e.

Suite à ces rencontres, quels enseignements avez-vous tiré de la vision que les jeunes élèves peuvent avoir des inégalités femmes/hommes dans notre société ?

J’ai beaucoup appris d’eux. Finalement on se rend compte que les jeunes abordent beaucoup mieux que certains adultes cette question de la discrimination faite aux femmes.

Cependant, la bataille est loin d’être gagnée. Les stéréotypes ont encore la vie dure. Quand je leur ai posé la question de savoir si les métiers avaient un sexe, si le métier de gendarme pouvait être exercé par une femme, ils répondent que c’est un métier d’homme parce que c’est un métier violent. Il reste encore beaucoup de travail à faire par rapport à cela.

Comme vous venez de nous le dire, le sujet de l’égalité femmes/hommes est presque mieux abordé par les jeunes que par beaucoup d’adultes. Quel rôle peut tenir l’éducation nationale auprès des jeunes sur ce sujet de société ?

Les référentiels de l’éducation nationale contribuent et contribueront à ouvrir les jeunes sur ces inégalités femmes/hommes. Les professeurs font un travail remarquable sur les discriminations.

Lors des échanges que nous avons eus avec les classes de CFA, de 4e et de 3e, on s’est aperçu que les jeunes avaient été bien préparés et du coup se posaient beaucoup de questions sur ce sujet des discriminations.

Cependant, ces inégalités femmes-hommes sont souvent renforcées par les femmes elles-mêmes, et c’est important de combattre cela dès leur plus jeune âge. Quand j’ai demandé à une classe de 4ème quels métiers ils voulaient faire plus tard, certains d’entre eux souhaitaient travailler dans un centre vétérinaire, mais les garçons disaient qu’ils voulaient être soigneurs alors que les filles parlaient d’être aides-soigneuses. Toute la différence est là.  Il faut donner confiance aux femmes, ne pas les laisser se dévaloriser.

Je suis pourtant optimiste concernant les nouvelles générations, les jeunes sont capables de se poser les bonnes questions et sont bien encadrés par le corps enseignant et toute la communauté éducative.

 

Vous avez organisé une soirée débat, intitulée « Parcours de femmes », dans la continuité des rencontres que vous avez réalisées au cours des journées de sensibilisation au droit des femmes. Quel bilan pouvez- vous nous faire de cette soirée débat ?

J’ai voulu aller vers les gens. C’était un objectif de mandat. Toutes ces rencontres faites auprès des jeunes, les échanges que j’ai eus  lors de cette soirée m’ont permis de me solidifier et d’être confiante sur le fait que cette lutte contre les discriminations faites aux femmes évolue dans le bon sens. Nous avons suscité la participation des enseignants, d’élus, de femmes responsables au sein de la communauté des gens du voyage et le témoignage de femmes migrantes.

Finalement ce combat, important, n’est-il pas « simplement » qu’une question de conviction, et de fait, plus un combat social que sociétal ?

Si on me pose la question, faut-il ou pas parler de l’égalité femmes-hommes au risque de donner de l’importance à un droit qui devrait être acquis ? Ma réponse est OUI. Je pense que c’est important d’en parler, parce que malheureusement il s’agit d’une réalité, d’un problème sociétal, de la conviction de chacun. Cependant, ce n’est pas aussi simple. La loi sur la parité a permis de faire évoluer les choses. Mais nous devons  aller plus loin. Nous devons dépasser cette notion de parité et parler d’égalité réelle. Les femmes ont droit aux postes à responsabilité.

La première fois que je me suis sentie discriminée en tant que femme c’était  dans mes fonctions d’élue, Vice-Présidente de la Région des Pays de la Loire puis députée. De plus, la discrimination s’accentue au fur et à mesure que l’on assume des responsabilités, que l’on a du pouvoir.

En parallèle, les femmes ne doivent plus se mettre de limites sur leurs capacités à progresser. Elles ont beaucoup de mal à se battre pour leurs idées. Mais c’est aussi le rôle des hommes que de les aider à prendre confiance en elles, et qui plus est, être attentifs aux stéréotypes qu’ils peuvent véhiculer.

En résumé, c’est l’affaire de tous !!!

Selon vous, les entreprises sont-elles dans la bonne voie pour lutter contre les inégalités femmes/hommes ? Par exemple les engagements RSE pris par ces dernières  peuvent –t-ils y répondre ?

Comme je vous l’ai dit, la première fois que je me suis sentie discriminée en tant que femme c’était à l’Assemblée nationale. C’est la raison pour laquelle le témoignage d’une jeune fille que j’ai rencontrée au CFA m’a beaucoup touchée puisqu’elle a été refusée à une poste d’apprenti dans une entreprise en tant que femme. Le pire, c’est que la décision a été prise par la femme du patron. C’est un garçon de sa classe qui avait eu le poste.

Pour qu’une femme puisse accéder à un poste, généralement il ne lui suffit pas d’être aussi performante qu’un homme, il faut qu’elle soit meilleure qu’eux. « La femme réussit dans la vie parce qu’elle travaille, l’homme réussi parce qu’il a du talent », c’est ce qui est malheureusement véhiculé.

Cette lutte contre les inégalités doit être un projet dans chaque entreprise.  Certaines d’entre elles mettent en place des politiques d’intégration et  d’égalité entre les femmes et les hommes, notamment dans le cadre de la RSE. Comme je l’ai dit les femmes ont droit aux postes à responsabilités.

Fort de cet échange, selon vous que pourrait ou devrait faire une association comme la nôtre pour contribuer à cette démarche de lutte contre les inégalités femmes/hommes ?

Souvent ce sont les femmes qui contribuent à la dévalorisation des femmes, par manque de confiance en leurs capacités à réussir notamment. Vous pourriez avoir un rôle à jouer sur cette thématique.

De même l’accession des femmes à des postes à responsabilités, décisionnels est un sujet important sur lequel vous pourriez communiquer auprès des jeunes, mais aussi sur lequel il pourrait être intéressant de mener une étude statistique spécifiquement sur votre domaine d’activité. Cela vous permettrait de chercher les corrélations entre le nombre de femmes dans les niveaux les plus élevés de formation et les niveaux des  postes qu’elles occupent. Cela permettrait de connaître les raisons pour lesquelles l’accession des femmes à des postes de cadres-dirigeants dans le secteur de la supply chain est toujours aussi compliqué.

 

Nous remercions Madame Rabin et sa collaboratrice parlementaire Sarah Caquineau pour leur accueil chaleureux et la qualité des échanges que l’on a pu avoir.

 

interview réalisé par Miriam CALPE et Arnaud POSNIC

Myriam CALPE (Alternante Master 1 - Ecole Supérieure des Transports – Paris 8e) & Arnaud POSNIC (Resp. du Conseil Jeunes & Professionnel).